Claude Guillaume est suspendu quatre ans par l’AFLD pour complicité de violation de suspension provisoire. L’entraîneur avait accueilli au sein du club Running 41 qu’il avait créé début des années 2010 plusieurs athlètes kenyans mis en cause pour des faits de dopage, comme Lazarus Too et Joyce Kiplimo. La marathonienne avait été contrôlée positive en avril 2019, et avait enfreint sa suspension provisoire en continuant à participer à des épreuves en France. Joyce Kiplimo avait créé avec Claude Guillaume un centre d’entraînement au Kenya, le JC Training Center, où des athlètes français séjournent régulièrement.
C’est une décision rare pour la France que la suspension d’un entraîneur pour des faits liés à une infraction aux règles anti-dopage. Le nom de Claude Guillaume est apparu ce mardi 1er juillet sur la liste des suspensions publiée par l’Athletics Integrity Unit et en parallèle sur le site de l’ Agence Française de Lutte Anti-Dopage. Avec une sanction de 4 ans pour le motif de complicité, de la part d’un personnel d’encadrement, de violation de suspension provisoire par un sportif, prise le 28 avril 2025 par la Commission des Sanctions.
Les éléments précis ne sont pas détaillés et Claude Guillaume n’a pas donné suite à nos questions. Il semble plus que probable que cette décision est en lien avec l’affaire de Joyce Kiplimo. La marathonienne avait elle-même été suspendue 12 ans par l’AFLD en décembre 2023. Car elle avait fait l’objet d’un contrôle positif aux anabolisants lors du marathon d’Annecy en avril 2019. Il s’agissait alors de sa 2ème infraction, puisque déjà suspendue deux ans en 2014, toujours pour des anabolisants.
Joyce Kiplimo fait des compétitions en France pendant deux ans alors qu’elle est suspendue
Mais surtout, Joyce Kiplimo n’avait pas hésité à enfreindre sa suspension provisoire après son contrôle d’Annecy, et on l’avait retrouvée sur Marvejols Mende en 2019 et 2021, Maroilles, Sedan Charleville, Langueux en 2019, Lens en 2021, les meetings de Carquefou et Cerizay. Elle avait aussi été présente en octobre 2021 sur le Circuit du Castellet pour une opération montée par Benoît Zwierzchiewski, de tentative de records du monde du 50 et 100 km, elle n’avait échoué que d’une poignée de secondes sur le record du monde du 50 km.
Joyce Kiplimo était alors licenciée en France, au club Running 41, créé par Claude Guillaume. Et c’est l’entraîneur de Blois qui se chargeait de l’inscription de ses protégés kenyans dans les différentes courses sur route où on les retrouvait. Il avait déjà été au cœur d’un premier dérapage, en 2018, avec Lazarus Too, qui avait remporté le marathon de Tours alors qu’il était suspendu.
Cette affaire avait grand bruit dans la région Pays de Loire car Claude Guillaume y avait longtemps été le Conseiller Technique Régional pour cette région, et connu pour avoir conseillé de nombreux athlètes, il citait ainsi François Barreau, Didier Sainthorand, Loïc Letellier, Norredine Bahar, Sid Ali Sakri.
Claude Guillaume crée au Kenya un lieu de stage avec Joyce Kiplimo
Sa vie de fonctionnaire fédéral allait prendre un sérieux virage lorsque par un hasard de rencontre avec la Béninoise Noelie Yarigo, Claude Guillaume allait se passionner pour le Kenya. Il avait découvert le pays dès 1997 pour des stages, mais il s’y installait alors avec la spécialiste du 800 mètres durant de très longues périodes, entraînant sur place des athlètes kenyans, qui intégraient ensuite le club Running 41 de Blois, et disputaient des épreuves courses sur route ou piste en France.
Parmi eux, Joyce Kiplimo. Fin 2018, était apparue l’information qu’il était l’entraîneur depuis peu de la jeune femme, licenciée à Blois, et qu’elle avait déjà été suspendue pour dopage. Claude Guillaume l’avait alors soutenue en affirmant qu’elle avait été victime de son manager et qu’il estimait normal de l’accompagner, invoquant les souffrances qu’elle avait endurées.
Claude Guillaume, toujours soutien de ses athlètes
Même lorsqu’était révélée fin 2023 cette sale affaire de son infraction aux règles anti-dopage, qui remontait donc à 2019, Claude Guillaume avait pris le parti du soutien à sa protégée. Il avait été prouvé qu’elle avait fourni pour sa défense de faux certificats médicaux, pour justifier une injection faite par un médecin au Kenya. Mais Claude Guillaume refusait de croire à ses falsifications. Il venait alors de créer avec elle le JC Training Center, l’une des structures de stages au Kenya gérées par des Français, qui a en particulier accueilli Morhad Amdouni pour des sessions de préparations.
Lorsque début 2024, SPE15 consacrait un article sur ce thème des stages au Kenya, Claude Guillaume ne répondait pas à mes questions, mais après la parution de l’article, il s’insurgeait une nouvelle fois, et répétait son opposition au dopage : « Aujourd’hui, j’ai 70 ans, et 50 ans de coaching en athlétisme, licencié à la FFA depuis 1964…. Je n’ai jamais utilisé ou incité à utiliser des produits dopants. »
Or justement, ce n’est nullement pour une implication dans le dopage d’un athlète que Claude Guillaume se voit sanctionné, mais pour avoir fermé les yeux sur la participation de sa protégée alors qu’elle était suspendue. Car en théorie, Joyce Kiplimo aurait dû restituer toutes les sommes empochées depuis avril 2019 lors de ses victoires comme à Marvejols Mende en juillet 2019 et juillet 2021, ou au semi de Maroilles en mai 2019. Par son attitude, Claude Guillaume a ainsi participé à une sérieuse duperie…. Sa suspension débute le 28 avril 2025, jusqu’en avril 2029. Elle lui interdit en particulier d’exercer des fonctions dans le domaine du sport, dans un cadre officiel. A première vue, la structure JC Training, privée, ne semble pas concerner par ces restrictions. Toutefois, ce serait tout de même incongrue qu’une athlète et un coach tous les deux suspendus puissent encore accueillir dans ces murs des athlètes français !
- Analyse : Odile Baudrier
- Photo : D.R.