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Florence Griffith Joyner, mise à l’honneur par la fédération américaine

Aux Etats Unis, dans le cadre du « Black History Month », qui met à l’honneur des personnalités black, la Fédération Américaine d’Athlétisme a fait un focus sur Florence Griffith Joyner, ses multiples médailles olympiques et ses deux records du monde. Un choix qui a irrité les observateurs les plus suspicieux, en particulier en Allemagne, pays tellement marqué par les dérives dopantes du passé.

Tout le mois de février, les hommages à des personnalités black se succèdent aux Etats-Unis sur le thème de « Black History Month ». Les coups de projecteurs s’attardent tantôt sur des hommes et femmes politiques, des acteurs-actrices, des chanteurs-chanteuses, des sportifs-sportives, des businessmen et women.

L’athlétisme n’est évidemment pas en reste avec pléthore de grands talents blacks, et les focus s’enchaînent sur le site de la Fédération Américaine d’Athlétisme, qui balaient plusieurs décennies d’histoire de l’athlétisme.

Le choix de l’USTAF de mettre en avant Florence Griffith Joyner, et sa carrière très prolixe n’a pas manqué de susciter quelques réactions hostiles à cette mise en avant d’une athlète à la réputation si sulfureuse.

L’attaque est venue de la journaliste allemande Grit Hartman, une référence dans l’antidopage mondial, membre de l’équipe de Hajo Seppelt, qui mène ce combat depuis plus de dix ans. A l’énoncé des références de la sprinteuse américaine, Grit Hartman a rétorqué par un tweet offensif : « Le genre de records qui n’ont plus été fêtés en Allemagne depuis très longtemps. » En le soulignant avec un hashtag très pertinent « #knowYourHistory » qui sonne comme un rappel à l’ordre aux officiels américains qu’aux Etats-Unis aussi, un devoir de mémoire devrait contraindre à balayer certaines performances.

C’est particulièrement le cas pour Florence Joyner Kersee, décédée prématurément à 39 ans, et qui conserve encore à son actif deux records du monde plus de 30 ans plus tard. Et des records très remarquables, celui du 100 mètres et du 200 mètres, avec 10’’49 et 21’’34, qu’aucune athlète n’a jamais vraiment menacé. Des chronos inaccessibles même pour une sprinteuse comme Marion Jones, (10 »65) qui évoluait pourtant boostée par une pharmacopée dopante de pointe.

Un documentaire effrayant sur le dopage d’Etat de l’Allemagne de l’Est

Et il est vrai qu’en Allemagne, une vraie volonté de clarifier le passé est apparue après la réunification de l’Ouest et de l’Est, qui avait instauré un dopage d’Etat très organisé. Une nouvelle preuve est justement apparue il y a quelques jours avec la diffusion par Hajo Seppelt d’un documentaire édifiant : « Expérimentations humaines : les tests secrets en RDA ». Il y révèle que l’Allemagne de l’Est a utilisé des athlètes de niveau moyen comme « cobayes » pour des tests de protocoles de dopage, déployés ensuite auprès de l’élite sportive, et Vladimir Cierpinski, champion olympique de marathon à Montréal en 1976, est directement visé.

Les témoignages recueillis par l’équipe de Seppelt démontrent une situation affligeante, avec des hommes et femmes marqués de manière définitive dans leur corps, physiquement et psychologiquement, par les dégâts provoqués par l’absorption à leur insu, et en doses massives de divers stéroïdes anabolisants, comme le STS 648, pourtant non autorisé pour les humains, et par des biopsies à répétition, qui attaquent à vie leur système lymphatique.

Une fois de plus, Hajo Seppelt amène à la réflexion sur la dangerosité des équipes dirigeantes du pays, qui n’ont pas hésité à mettre en péril la santé des personnes au nom de la raison d’Etat. C’est une nouvelle illustration que la recherche des dérives passées devrait être une règle dans tous les pays, pour éviter d’embellir un passé trop souvent glauque. Et que la méthode de cacher les miettes sous le tapis, comme le fait la Fédération Américaine, ne devrait plus avoir cours…

  • Texte : Odile Baudrier
  • Photo : D.R.