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Un vétéran américain positif à la nandrolone

Kévin Castille, un Américain de 48 ans, a été suspendu 4 ans pour usage de nandrolone. Il dominait depuis une décade la catégorie Master dans les courses sur route aux Etats-Unis, et comptait deux  records du monde des 45 ans à son actif. Le monde du running US n’est pas vraiment surpris. L’histoire rappelle celle d’Eddy Hellebuyck.

Une grande déception, mais pas vraiment une surprise. C’est ce qu’a ressenti le monde du running US à l’annonce de la suspension pour quatre ans de Kévin Castille. Un coureur complètement méconnu en Europe, son palmarès s’égrenait sur les courses sur route américaines, où il raflait victoire sur victoire, et les dollars avec. Selon « The Times of San Diego », il aurait accumulé plus de 60.000 dollars de gain dans la dernière décade. Avec aussi deux records du monde dans la tranche des 45 ans, avec 14’29’’ sur 5 km, et 29’04’’ sur 10 km.

En avril 2019, à 48 ans, il décrochait un nouveau titre national, avec la victoire sur le 10 km. Mais cette course allait interrompre sa spirale victorieuse, avec un contrôle anti-dopage livrant la présence de nandrolone. La nouvelle qui n’a émergé que lors de la décision de l’USADA prise en ce mois de juillet a suscité des réactions contrastées, entre tristesse et satisfaction.

Un ancien dealer, qui retrouve le running après la prison

Tristesse car Kevin Castille incarnait la rédemption, à travers un parcours tellement atypique. Dealer de cocaïne en Louisiane, à 20 ans, incarcéré à 25 ans pour trafic de drogue. Un séjour en prison qui allait jouer un rôle d’électrochoc, aimait-il à expliquer à tout va, comme dans les colonnes du « New Yorker », début 2016, pour le détourner de cette vie malhonnête, et le ramener vers la course à pied, son sport de prédilection dans ses jeunes années.

C’est ainsi qu’à 32 ans, après plus de 20 ans sans entraînement, il allait emmagasiner des performances de gros niveau, comme ses 28’49’’ au meeting de Stanford 2004. Il justifiait ces chronos d’une manière très simple : toutes les années passées à dealer sans faire d’entraînement avaient économisé ses jambes. Et de pointer du doigt l’avantage de disposer de jambes tellement « fraîches ».

Mais quelques observateurs ne souscrivaient pas à cette théorie séduisante, et s’interrogeaient sur sa phénoménale capacité de récupération. Comme osent maintenant le révéler dans « The Times of San Diego » certains de ses rivaux masters, ulcérés également de constater sa capacité à répéter les compétitions et les bons chronos.

Eddy Hellebuyck, un autre master dopé

Kévin Castille perpétue ainsi une très mauvaise tradition, du dopage chez les masters. Son histoire rappelle un autre épisode quasi semblable, celui d’Eddy Hellebuyck. Le Belge installé à Albuquerque écrémait les victoires, créait la surprise en se qualifiant pour la Belgique pour les JO d’Atlanta, puis devenait américain, représentait son nouveau pays aux Mondiaux de Séville en 1994, et engrangeait de jolis cachets. Et c’est en 2004, qu’un contrôle positif à l’EPO dévoilait sa tricherie qu’il affirmait par la suite avoir justement débuté lors de son passage dans la catégorie Masters…

Eddy Hellebuyck avait alors pris le parti de révéler tous ses errements dans une longue confession dans les colonnes de Runner’s World, mais ce témoignage à cœur ouvert allait lui coûter toute sa vie. Son épouse, ulcérée de ses révélations, le rejetait, Eddy Hellebuyck, habitué au luxe de sa maison d’Albuquerque, se retrouvait dans un foyer pour SDF, à Tucson, en Arizona, avant de remettre le cap sur la Belgique, pour y rebâtir une nouvelle vie autour d’un travail chez Décathlon.

La brillance et l’argent allaient vite disparaître. Et l’histoire pourrait bien se répéter pour Kévin Castille…

  • Texte : Odile Baudrier
  • Photos : D.R.