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Un bilan morose pour la lutte anti-dopage en France

Les chiffres livrés par l’AFLD dans son rapport annuel laissent apparaître un bilan très morose de la lutte anti-dopage durant l’année 2020, avec seulement 28 cas positifs. Certes la pandémie n’a pas été sans conséquences sur les actions de contrôles, mais il s’avère très faible par rapport aux années antérieures. A titre de comparaison, en 2008, 264 résultats anormaux avaient été enregistrés, et 202 en 2017. Autre point de repère, il y avait eu 28 cas positifs en athlétisme en 2012 !

Un véritable tassement des résultats de la lutte anti-dopage en 2020. C’est le constat que livre le rapport annuel de l’AFLD publié en cette mi-juin 2021. Et il apparaît d’autant plus implacable lorsque les chiffres de prélèvement et surtout de contrôles positifs sont comparés aux années précédentes.

Pour mener ce travail, il faut s’obliger à consulter les rapports annuels successifs, les références antérieures n’étant plus diffusées dans le rapport depuis 2016, et l’année 2015 est la dernière où apparaît une figure qui reprend les chiffres des prélèvements urinaires depuis 2010. Bien dommage car cela permettait d’un coup d’œil de visualiser l’évolution de l’activité anti-dopage au fil du temps.

La compilation des éléments depuis 2006 fait entrevoir une chute importante du pourcentage de Résultats Anormaux d’Analyse, durant les deux dernières années. Dès 2019, le pourcentage se voit divisé par deux, et encore par deux en 2020, pour tomber à 0.43% de contrôles positifs, et seulement 28 cas.

18% de contrôles en moins mais une baisse de 57% de cas positifs

Certes l’année 2020 a été très perturbée par la crise sanitaire, qui n’a pas permis de réaliser le nombre de contrôles habituels, compte tenu de l’absence de compétitions. Ce sont ainsi 1400 contrôles en moins qui ont été effectués dans cette période, soit une baisse de 18%. Mais la diminution du nombre de RAA est, elle, de 57% en 2020, et de 79% depuis 2019.

Pour justifier ce tout petit chiffre de contrôles positifs, Madame Laurent, la présidente de l’AFLD, a soutenu durant la conférence de presse menée en virtuel, que ceci résultait de la politique de recentrage sur le haut niveau, impulsée par l’AFLD, afin de respecter les règles fixées par l’Agence Mondiale Anti-dopage. Voilà son explication : « Les athlètes de haut niveau utilisent moins le dopage car ils connaissent les règles. Certains sont négligents.» (**) C’est ce qui expliquerait la chute des cas positifs.

Une interprétation rectifiée par Damien Ressiot, responsable des contrôles entre 2016 et 2016, et maintenant chargé des enquêtes à l’AFLD, qui estimait, lui, : « Les sportifs qui se dopent respectent des protocoles très précis par rapport au calendrier des compétitions prévues. L’année dernière, les calendriers ont constamment évolué et il était donc très compliqué de trouver le bon timing pour les sportifs qui veulent tricher. »

Un seul cas positif en athlétisme, sur 817 contrôles

Cette vision apparaît plus crédible, mais il reste le sentiment que beaucoup de moyens ont été déployés pour aboutir à un petit score. D’autant que certains sports «à risque » ont contribué à augmenter le pourcentage de positifs, comme les MMA (Mixed Martial Arts), avec 15% de positifs, la boxe (2.8%).

Avec 817 prélèvements, l’athlétisme demeure parmi les sports les plus contrôlés, derrière le foot (1447), le cyclisme (1328) et le rugby (817). Cependant, on est très loin des statistiques de ces dernières années, avec plus de 1800 prélèvements effectués en 2015 et 2015. Et côté résultat, un seul Résultat Anormal a été identifié, celui d’Ophélie Claude Boxberger, à l’EPO. C’est bien peu au regard des 25 cas de l’année 2015, ou encore des 28 de 2012…

Texte et recherches statistiques : Odile Baudrier

(**) Le lundi 21 juin, Julien Marival, chargé de communication et des relations médias pour l’AFLD, m’a transmis une demande de correctif sur ce point. Là voilà : « La déclaration exacte de la présidente lors de la conférence de presse était plutôt celle-ci : « Les athlètes de haut niveau recourent sans doute moins au dopage que les amateurs car ils connaissent les règles et sont moins négligents sur leur médicamentation et leur alimentation.»

PRELEVEMENTS ANTIDOPAGE REALISES DEPUIS 2006

  TOTAL PRELEVEMENTS PRELEVEMENTS URINAIRES PRELEVEMENTS SANGUINS PRELEVEMENTS PASSEPORT BIOLOGIQUE RAA % RAA
2006 6371       244 3.7%
2007 8600       202 2.35%
2008 10368       264 2.54%
2009 8065       247 3.1%
2010 10511 9686 683   237 2.25%
2011 9514 5935 3555   164 1.73%
2012 10559 7843 2626   222 2.6%
2013 11040 8485 2425   170 1.76%
2014 10414 8373 1932   111 1.24%
2015 8606 8006 600   161 1.73%
2016 7445 6750 695 1163 139 1.9%
2017 (*) 5183 4220 473 490 202 1.93%
2018 8198 7201 479 518 134 1.74%
2019 7904 6992 438 474 65 0.84%
2020 6520 5852 249 421 28 0.43%

(*) En 2017, le laboratoire d’analyses a fait l’objet d’une fermeture par l’Agence Mondiale Anti Dopage. Les analyses ont été effectuées seulement durant 3 trimestres.

DETAILS SUR PRELEVEMENTS

  % SPORTIFS NIVEAU NATIONAL OU INTERNATIONAL % CONTROLES HORS COMPETITION RAA SUR CONTROLES EN COMPETITION RAA SUR CONTROLES HORS COMPETITION NBRE SUBSTANCES DETECTEES  
2010            
2011   39%        
2012   39%        
2013   31%        
2014   43%        
2015     156 7 240  
2016   43%        
2017   46%        
2018   47%        
2019 60% 51%        
2020 81% 67%        

PRELEVEMENTS DANS L’ATHLETISME DEPUIS 2012

  PRELEVEMENTS URINAIRES RAA   % RAA PRELEVEMENTS SANGUINS RAA % RAA PRELEVEMENTS PASSEPORT BIOLOGIQUE
2012 1005 28 2.4%        
2013 1472 22 1.5%        
2014 1339 12 0.89% 170     170
2015 1811 25 1.4% 304 0   178
2016 1353 21 1.1% 171 1 0.56%  
2017 1197 (urine et sanguin) 11 0.8%       265
2018 1821 17 0.9% 83 1 1.2%  
2019 1441 12 0.8% 62 2 3.20%  
2020 817 1 0.1%