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Peter Bol, faux positif à l’EPO, un camouflet pour l’antidopage

L’Australien Peter Bol a été officiellement disculpé de dopage. Son échantillon détecté positif à l’EPO s’est finalement révélé négatif après une nouvelle analyse ! Un camouflet pour la lutte anti-dopage, forcée d’admettre que les tests EPO contiennent une part d’inexactitude en raison des standards différents entre les laboratoires.

Un échantillon déclaré positif et finalement négatif. C’est la situation inédite connue par l’Australien Peter Bol. L’annonce officielle est tombée : son échantillon prélevé en novembre 2022 et déclaré positif à l’EPO se révèle finalement négatif. Une grande première pour l’anti-dopage qui jette le discrédit sur les tests d’EPO…

D’entrée de jeu, le « cas » Bol s’était singularisé. Car l’échantillon B n’avait pas, lui, été déclaré positif à l’EPO. Peter Bol s’inscrivait ainsi dans la continuité d’une autre affaire très étonnante, celle de Bernard Lagat. L’Américain, Kenyan à l’époque, avait connu la même histoire d’un échantillon B qui ne colle pas avant l’échantillon A.

Mais pour Peter Bol, l’histoire a hoqueté encore un peu plus. L’agence anti-dopage australienne a demandé le réexamen de l’échantillon A. Avec une conclusion dérangeante : l’EPO n’y est finalement pas détectée !

Dès le début, Paul Greene, l’avocat américain de Peter Bol, avait émis une forte réserve sur la fiabilité du test en découvrant qu’une seule barrette apparaissait positive sur les 5 barrettes que compte le test. Pour lui, les choses étaient entendues : il n’aurait pas dû y avoir de poursuites contre son client.

Deux échantillons positifs, puis négatifs

A l’annonce de la suspension provisoire de Peter Bol, la presse australienne allait très vite révéler un autre élément plutôt perturbant : un échantillon du jeune athlète avait déjà été déclaré positif un an plus tôt. Mais un deuxième laboratoire l’avait estimé, lui, négatif.

Après ces dissensions, aucune suite n’avait évidemment été donnée par l’agence anti-dopage australienne, mais Peter Bol avait été, en toute logique, placé « sous surveillance ». Il avait ainsi été testé 26 fois durant l’année 2022, 16 fois pour des tests urinaires et 10 pour des sanguins. Il avait été l’objet d’une fouille approfondie à l’aéroport de Sydney à deux reprises, lors de son départ puis quelques mois plus tard pour son retour en Australie. Et cette année 2022 sous haute surveillance s’était achevée par cet ultime test de novembre où l’EPO allait être découverte.

L’agence antidopage australienne aurait-elle dû faire preuve de plus de prudence avant de valider le contrôle positif et de décider en janvier 2023 de la suspension provisoire de l’athlète ? Le débat agite évidemment une presse australienne avide, comme dans tous les pays, de pointer du doigt les disfonctionnements de la lutte anti-dopage. Car les dommages pour Peter Bol, comme pour tout athlète injustement accusé de dopage, sont évidemment énormes.

Les tests EPO, une méthode controversée

Une chose est sûre, cette affaire explose en boomerang pour dévoiler les failles des tests EPO. Une réalité peu divulguée hors de la sphère des experts anti-dopage. Toutefois l’avocat de Peter Bol, tout comme les médias australiens, n’ont pas eu de difficultés à obtenir des témoignages de scientifiques qui affaiblissent la fiabilité de ce test. Le journaliste du « Sydney Morning Herald » a ainsi recueilli le point de vue très offensif d’un groupe de quatre professeurs norvégiens, convaincus que les laboratoires agréés par l’Agence Mondiale Anti Dopage font trop confiance au résultat des tests. Et Michael Gleeson  a même obtenu d’un expert norvégien pour « Brisban Times » la désignation du laboratoire accusé d’incompétence : en l’occurrence Cologne. Les analyses EPO du laboratoire allemand seraient peu fiables. Et ce n’est que parce que la 2ème analyse de l’échantillon B a été effectuée par Oslo que la possible innocence de Peter Bol a incité à la levée de sa suspension provisoire, puis, après enquête, à l’arrêt de la procédure.

Pour Pierre Sallet, spécialiste de l’anti dopage, le constat est plutôt mitigé :  » Le test de détection de l’EPO est un test extrêmement complexe tant au niveau technique que des procédures de conservation des échantillons. Paradoxalement le résultat de ce test repose sur une interprétation humaine d’une image (immunoblot image) avec des techniques de détection pouvant également varier selon des standards prédéfinis (IEF-PAGE/SAR-PAGE / SDS-PAGE). Par le passé il a déjà été démontré et publié que des laboratoires accrédités pouvaient fournir des résultats différents pour l’analyse d’un même échantillon… » Mais en toute transparence, le Lyonnais explique aussi : « Aujourd’hui si le contrôle qualité des laboratoires accrédités s’est considérablement amélioré, les combinaisons d’EPO mais surtout l’utilisation d’EPO complètement biosimilaires (bEPO) peuvent expliquer les contradictions toujours observées actuellement dans la fiabilité du test. De plus cet aspect analytique fragile n’est qu’une partie de la chaîne de détection. En effet beaucoup d’autres moyens permettent pour des top experts de contourner en amont les procédures actuelles pour désormais cette vieille molécule qu’est l’EPO et qui fêtera bientôt ses 40 ans… »

L’EPO Biosimilaire, 100% non détectable

Une analyse qui devrait confirmer la nécessité de revoir la technique du test EPO, mais l’Agence Mondiale a malheureusement balayé cette idée d’un simple revers de main… Toutefois, avec réalisme, Pierre Sallet souligne aussi les énormes possibilités apportées par l’EPO Biosimilaire. Celle-ci marque uniquement dans le secteur endogène et rend donc tous les contrôles complètement obsolètes.

Cette donnée n’est pas complètement nouvelle. Par exemple, la « Biosimilar Epoetin » est commercialisée depuis 2018 et disponible aussi via le Black Market. Avec sa capacité 100% biosimilaire, aucune dissociation n’est possible au test. 100% efficace et 0% détectée : c’est donc un petit bijou pour les athlètes douteux !

  • Analyse : Odile Baudrier
  • Photo : D.R.