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Ophélie Claude-Boxberger, suspendue deux ans

La sanction est tombée pour Ophélie Claude-Boxberger qui est suspendue pour deux ans, suite à son contrôle positif à l’EPO de septembre 2019. La commission des sanctions de l’AFLD n’a pas suivi la demande d’une suspension de huit ans au motif que la steepleuse aurait incité Alain Flaccus à s’accuser de l’injection d’EPO. Au contraire même, elle a réduit de moitié la sanction classique de 4 ans.

Texte : Odile Baudrier

Ce fut un long, très long feuilleton, depuis le mois de novembre 2019, qui s’achève en ce mercredi 7 avril 2021, avec la décision d’une suspension de deux années pour Ophélie Claude-Boxberger.

La Commission des Sanctions a ainsi pris en compte les éléments troublants sur cette affaire tumultueuse. Le seul élément tangible, la présence d’EPO dans l’échantillon urinaire prélevé le 18 septembre lors d’un contrôle inopiné, et confirmé par l’analyse de l’échantillon B, aurait dû se conclure par une suspension de quatre ans, selon les règles du code mondial anti-dopage.

Mais les dix membres de la Commission ont pris en compte le contexte rendu complexe par les revirements d’Alain Flaccus. Sa déposition, effectuée en visioconférence et hors du public, lors de la séance de la commission des sanctions n’était pas apparue très convaincante. Il se situait ainsi dans la continuité de ses errements de ces 18 derniers mois, où tour à tour, il s’était accusé d’avoir effectué l’injection à l’insu d’Ophélie, puis l’avait nié, avant de revenir à sa première déclaration sur la demande de la mère d’Ophélie, et à nouveau, avait réfuté toute responsabilité dans ce geste lors de son ultime audition auprès de l’AFLD.


Le doute a bénéficié à Ophélie Claude-Boxberger

Un imbroglio s’appuyant sur des relations pour le moins ambigües entre Ophélie Claude-Boxberger et Alain Flaccus, son beau-père, qu’elle accuse de viols commis avant ses 15 ans, avec une plainte en cours d’instruction par les gendarmes de Montbéliard, mais auquel elle demande de l’accompagner pour un long stage à Font Romeu, et de l’assister par des massages quotidiens.

Dans ses questions posées à la jeune femme durant l’audience du 15 mars, il était apparu chez les membres de la Commission des Sanctions une certaine incrédulité face la possibilité matérielle d’une piqûre effectuée à l’insu de l’athlète par Alain Flaccus, avec le mobile d’une vengeance sentimentale, pour nuire au nouveau compagnon de la jeune femme, le Docteur Jean-Michel Serra.

Toutefois au final, un vrai doute semble être demeuré au moment de trancher et a ainsi bénéficié à Ophélie Claude-Boxberger, qui reçoit une sanction « réduite ». Les règles du code mondial anti-dopage établissent qu’un sportif est responsable de toute substance présente dans son organisme, mais l’incertitude du rôle véritable d’Alain Flaccus dans cette injection d’EPO s’est transformée en circonstances atténuantes.

Un camouflet pour l’AFLD

Avec cette décision, la Commission des Sanctions envoie un camouflet terrible à l’Agence Française de Lutte contre le Dopage, qui souhaitait carrément un doublement de la suspension, pour monter à huit ans. Ceci au motif que Ophélie Claude-Boxberger avait incité son ex beau-père, et « soigneur », Alain Flaccus de s’accuser d’avoir effectué à son insu cette injection d’EPO. Le juriste de l’AFLD avait également appuyé cette demande d’allongement par des problèmes autour de la localisation de l’athlète, par des incohérences sur ses problèmes sanguins gastriques, sur ses stages, plans d’entraînements, expositions à l’altitude. D’où cette conclusion sévère, qu’Ophélie avait fourni de fausses déclarations pour éviter l’interprétation de son profil biologique.

Mais dès l’audience du 15 mars, Rémi Keller, le président de la Commission des Sanctions, avait montré son hostilité sur cette idée d’une deuxième infraction, susceptible de doubler la sanction à 8 ans. Pour une raison de droit : les problèmes autour de la localisation et les incohérences sur les problèmes de santé et expositions à l’altitude ne pouvaient être pris en compte, car existant avant la première notification. Ce n’est donc, selon le président de la Commission, que l’éventuelle collaboration entre Ophélie et Alain Flaccus pour bâtir un scénario qui aurait pu éventuellement être pris en compte pour cet allongement. Mais les preuves de cette collaboration n’ont pas été clairement établies par l’AFLD.

Un deuxième échantillon contient de l’EPO

L’information d’un deuxième échantillon contenant de l’EPO a visiblement peu pesé contre l’affirmation d’Ophélie Claude-Boxberger de cette injection unique effectuée frauduleusement par un homme malveillant, un soir de très grande fatigue, où elle s’était écroulée, assommé par un cocktail de médicaments calmants.

Cet échantillon avait suscité une grande surprise dans le clan Claude-Boxberger. Il avait en réalité été prélevé le 23 septembre, à son arrivée à Doha, pour y disputer son premier championnat du monde. Non pas pour un contrôle anti-dopage, mais pour la constitution de son passeport biologique.

Du coup, dans un premier temps, l’analyse de ce prélèvement n’avait été effectuée que sous l’angle biologique, sans recherche de produits. Et ce n’est que sur la demande de l’AFLD que l’échantillon a été ensuite rapatrié sur Châtenay Malabry, où le laboratoire allait détecter de l’EPO.

Une méthode un tantinet méconnue, mais parfaitement légale sur le plan juridique, m’a précisé un membre de l’Athletics Integrity Unit : durant une enquête, il est possible d’analyser tout échantillon disponible pour mieux étayer les investigations. Une fois effectuée l’analyse pour l’objectif initialement prévu, il devient alors possible de le tester pour y rechercher un produit ou un autre, et ceci pendant 10 ans. Avec une petite restriction : si un échantillon prélevé pour le passeport biologique s’avère contenir un produit interdit, il n’est alors pas possible de notifier une violation des règles anti-dopage. Ou du moins, cela reste possible, à condition d’informer l’athlète que son échantillon a été divisé en deux, afin de disposer à la fois d’un échantillon A et d’un B, pour anticiper le cas d’une demande de contre-expertise.

Cet échantillon de Doha avait permis à l’expert Martial Saugy de conclure à une utilisation non isolée de l’EPO. Mais au final, cette analyse n’a pas été retenue par la commission des sanctions. Ophélie Claude-Boxberger conserve la possibilité d’un appel de cette décision devant le Conseil d’Etat. L’AFLD déposera très certainement un appel devant le Conseil d’Etat. L’Athletics Integrity Unit et l’AMA conservent également la possibilité de déposer un recours sur cette décision.

  • Texte : Odile Baudrier
  • Photo : D.R.