La 30ème édition de l’Ascension du Mont Cameroun de février 2025 s’est conclue de manière choquante avec la suspension pour dopage de Usheni Hassan, le vainqueur et de Abdou Amadou, le 3ème. Un séisme au Cameroun où cette épreuve affiche une renommée énorme, et alors que ce pays ne comptait jusqu’alors aucun cas de dopage recensé.
L’Ascension du Mont Cameroun compte parmi les « ancêtres » de la course de montagne puisque cette édition de février 2025 était la 30ème de cette épreuve amenant les coureurs jusqu’au sommet du Mont Cameroun, à plus de 4000 mètres, à partir de Buea.
Pourtant au fil des années, la course de L’Espoir, autre dénomination, n’a pas acquis la réputation mondiale à laquelle sa difficulté aurait pu l’autoriser, et n’a rejoint aucun circuit de trail, officiel ou privé. Chaque mois de février, c’est plutôt un Championnat national du Cameroun qui s’organise, avec tout le pays qui tourne son attention vers ce rendez-vous, et une remise des récompenses effectuée par le Ministre des Sports.
Et dans toutes les provinces, les coureurs se préparent pour briller sur la ligne d’arrivée installée en plein cœur du stade de Buea. Avec à la clef des primes financières particulièrement incitatives : le premier et la première empochent 10000 francs CFA, soit 15.000 euros, une fortune dans un pays où le salaire moyen tourne autour de 140 euros.
Usheni Hassan, un éleveur vainqueur avec le record
Le 22 février, Usheni Hassan termine vainqueur, avec un temps canon, de 4h40’, gommant ainsi de 6 minutes le record de l’épreuve. Le coureur de 29 ans, originaire de Kumbo, dans le Nord Ouest du Cameroun, a déjà participé plusieurs fois à l’épreuve, dès 2019, selon ce qu’il déclare aux journalistes à l’arrivée. Et les médias camerounais relaient également l’idée qu’il aurait remporté dans les mois précédents plusieurs victoires sur des épreuves locales. Des données qu’aucun élément tangible ne permet de vérifier : Usheni Hassan n’apparaît dans aucune base de données connue. Le jeune homme explique également qu’il utilisera la grosse prime remportée pour accroître le nombre de bêtes de son troupeau.
Mais ce jour-là, l’OCALUDS, l’agence anti-dopage du Cameroun, a diligenté des contrôles, et fin mai, tombe l’information que l’échantillon d’Usheni Hassan a révélé la présence de tramadol, un anti-douleur interdit par le Code Mondial Anti-dopage depuis début 2024, et qu’il a reçu une suspension de 4 ans.
Abdou Amadou, le 3ème, fuit le contrôle
Et il s’ajoute également l’annonce de la suspension, également pour 4 ans, de Abdou Amadou. Tout simplement parce que le coureur, 3ème de l’épreuve, avait préféré fuir le contrôle, plutôt que de risquer de voir son prélèvement détecter un produit interdit.
Deux suspensions sur la même course, c’est (heureusement !) plutôt rare… Au Cameroun, l’affaire a pris une importance énorme, compte tenu de la notoriété de l’épreuve. Et également car le Cameroun connaît officiellement peu le phénomène du dopage, du moins dans le domaine de l’athlétisme. A date, la base des sanctions d’Athletics Integrity Unit ne comporte d’ailleurs aucun nom d’athlète camerounais.
Cette méconnaissance amène ainsi les journalistes à amplifier les conséquences de cette situation, comme pour le média en ligne 237online, qui n’hésite pas à annoncer à leurs lecteurs que cette suspension pourrait compromettre la participation du Cameroun aux prochaines compétitions internationales, comme les Jeux de la Francophonie. Un simple regard du côté du Kenya pourrait les rassurer : avec 135 athlètes actuellement suspendus, aucune sanction officielle n’a frappé le pays !
- Analyse : Odile Baudrier
- Photo : D.R.