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Rouguy Diallo, échec et mat sur le triple saut

Le championnat d’Europe ne réussit pas à Rouguy Diallo. La Championne du monde junior en titre termine 5ème seulement à Tallin. Une grande déception pour la protégée de Teddy Tamgho.

 

Rouguy Diallo

Rouguy Diallo

 

Elle ne comprend pas. Ce concours l’a laissée perplexe. Et Rouguy Diallo l’avoue sans détour : « Il manquait quelque chose. » Quoi ? Elle n’en sait rien du tout. Elle sait juste que ce soir, elle visualisera les vidéos de ses sauts et qu’elle espère pouvoir analyser les raisons de cet échec.

5ème seulement alors qu’elle arrivait avec la 3ème performance, et avec l’étiquette de championne du monde junior en titre. Les premières au bilan ont honoré leur rang, la Lituanienne Dovile Dzindzaletaite et l’Ukrainienne Tetyana Ptashkina, mais ont aussi pointé la Roumaine Elena Panturoiu et l’Italienne Dariya Derkach, qu’elle supplantait sur le papier.

Le vent en rafales aléatoires n’a pas facilité le concours, elle l’admet pour ses deux premiers essais : « J’arrivais vite sur la planche, mais avec le vent, mon impulsion était tardive. »

Mais Rouguy Diallo refuse de s’attarder dans de fausses excuses. Elle assène même : « Les autres filles ont réussi à s’adapter aux conditions. J’aurais dû m’adapter aussi ! » Le niveau de ses rivales ne l’a pas surpris : «  Elles sont au niveau de leur record. » Elle anticipait de toute façon une marque à 14.20 m pour décrocher l’or.

14.20 mètres, exactement la performance qu’elle avait obtenue l’année dernière, qu’elle sublime aussi avec le titre de championne du monde junior. Dès lors, son avenir semblait tout tracé, elle le concède : « C’est vrai après les 14.20 mètres, je visais Pékin. Maintenant, je ne peux plus y penser. » Cette saison 2015 n’a finalement pas été à la hauteur de la précédente, elle se bloque à 13,80 m : « Oui, c’est clair, j’ai moins réussi. Mais je ne me fais pas de soucis ! »

Rouguy Diallo, brillante dès cadette

Ce petit cahot ne peut faire oublier la brillance de Rouguy Diallo depuis ses années cadettes. Un homme peut particulièrement en témoigner. Jean-Louis Jacob a été son entraîneur trois ans lors de son passage au Pôle d’Epreuves Combinées de Montpellier, qu’elle avait rejoint, avant de mettre le cap sur Boulouris pour évoluer sous la houlette de Teddy Tamgho.

A Montpellier, Jean-Louis Jacob supervise les sauts horizontaux, il conseille ainsi actuellement Ionis Guuillaume, une cadette surdouée, à laquelle il prédit un avenir exceptionnel. Comme il l’avait anticipé en son temps pour Rouguy : « Oui, on avait vite vu qu’elle irait très loin. » Deux repères l’ont particulièrement marqué. Sa place de 6ème au France Elite alors qu’elle n’est que cadette 1. Ses 13.21 mètres réalisés en cadette 2, qui n’ont jamais été homologués : « C’était une compétition UNSS et le fichier n’avait pas été transmis à la FFA !!! »

Toutefois à titre exceptionnel, la FFA acceptait de prendre en compte cette marque, qui correspond au minima pour le Championnat du Monde junior, et qualifiait Rouguy Diallo pour son premier mondial, en 2012 à Barcelone, où elle termine 8ème. C’est sur la lancée qu’elle tournera le dos aux épreuves combinées pour se consacrer au triple, comme le lui préconisait d’ailleurs depuis longtemps Jean-Louis Jacob.

Depuis deux ans qu’elle a rejoint Teddy Tamgho, l’ex-coach se contente de suivre avec attention son parcours, mais à Tallin, il a accepté de jouer le rôle de suppléant, pour pallier à l’absence de Teddy Tamgho, encore entravé par son opération du tendon d’Achille.

Jean-Louis Jacob ne dissimule pas une certaine nervosité à assumer cette fonction. Il tente de recaler Rouguy Diallo, en difficultés avec ses marques, mais les choses demeurent chaotiques. A la sortie du stade, il a juste le temps de glisser quelques mots à l’athlète, pressée par la contrainte d’un contrôle anti-dopage : « Tu avais du jus au 1er essai. Ensuite tu avais moins de jus. Mais tu avais un manque de reprise entre le 2ème et le 3ème. Tu verras sur les vidéos. »

Des images qui tourneront sans doute longtemps dans les souvenirs de Rouguy Diallo.

  • Texte : Odile Baudrier
  • Photo : Gilles Bertrand