Le 800 mètres américain a toujours été d’une excellente densité. Dans le cercle des prétendants, Brandon Johnson, désormais entraîné par Joachim Cruz, pourrait bien brouiller les cartes en 2015.
0.04 centième de seconde, ce n’est même pas le temps d’un battement de paupière. Sur la photo finish imprimée en noir et blanc, cet écart n’est guère plus épais qu’un cil.
0.04 centième de seconde, depuis deux ans, Brandon Johnson ne pense qu’à ça. A ce coup d’œil de travers sur l’écran jaune lorsque son temps s’est affiché. Les gros mots qui montent dans la bouche. Puis la colère d’avoir loupé la finale pour…pour…pour…un rien de rien. Il quitte Moscou la rage au vente. Back to home
Sur 800, les carrières peuvent être courtes. Distance de transition, équilibre délicat entre vitesse et endurance, équation aux multiples inconnues. Les sorties de virage peuplent et hantent les arrières salles du 800. Des voies de garage qui vous laissent parfois sur le pont, les pointes en l’air.
Il rejoint le groupe de Joachim Cruz à San Diego
2014, Brandon Johnson s’est retrouvé dans l’une de ses arrières salles. Le rideau lui est tombé dessus peu après le Mondial de relais. Une salle blessure qui l’écarte des pistes une saison durant. Il soigne alors à Colorado Springs aux côtés de Dathan Ritzenhein lui aussi cloué au sol. Son seul chrono de l’année, un régional 1’47 » pour celui qui a déjà réussi 1’43 »84.
L’automne n’est pas encore annoncé qu’il décide de prendre le manche à balais pour chasser les mauvaises herbes. Première grande décision, il quitte Abdul Morceli, son coach pour Joachim Cruz ancien champion olympique du 800 mètres, médaillé d’or à Los Angeles puis médaillé d’argent à Séoul. Il entraine au San Diego Track Club. Il a son groupe demi fond et sur le sautoir d’à côté, le groupe saut en longueur et triple est l’un des meilleurs du monde avec Brittney Reese et Will Claye. L’émulation est là.
De la vitesse mais plus d’altitude
Nouvel entraîneur, nouvelle orientation sous le soleil californien. Brandon Johnson est un coureur profilé 400 – 800. En junior, n’est-il pas médaillé d’argent au Mondial 2004 sur 400 mètres haies et médaillé d’or avec le relais 4 x 400 mètres ?! Sous l’impulsion du coach brésilien exilé aux Etats Unis ordre est de revenir à une préparation où la vitesse l’emporte sur le volume. Il baisse alors le compteur kilométrique hebdomadaire, 90 km contre 130 comme il le précise dans un entretien accordé auprès du reporter Jonathan Gault (Letsrun.com). Il stoppe également les cycles en altitude car rien ne prouve que l’effet recherché puisse être bénéfique pour ce sprinter « long ». L’inverse est même à craindre, à savoir une altération de ses qualités de vitesse.
Ainsi, lui tardait-il de se remettre sur orbite pour valider les premiers chronos, les premières sensations, les bons choix. Un aller et retour pour Winston – Salem en Caroline du Sud et il signait un 1’48 »27 très encourageant lors des Camel City Races. Validant ses choix et ses espérances. Se qualifier en 2015 pour le Mondial et rentrer en finale où là tout est autorisé. Pour effacer de sa mémoire les 0.04 centième de seconde. C’est infiniment petit mais démesurément important.
> Texte et photo Gilles Bertrand